jeudi 8 juillet 2010

L'éducation de plus en plus fragilisée dans les zones de conflits armés

L'éducation de plus en plus fragilisée dans les zones de conflits armés
Article paru dans l'édition du 17.02.10
Dans trente-deux pays, les élèves et les enseignants sont devenus une cible croissante pour les belligérants, selon l'Unesco
n Afghanistan, 670 écoles ont été la cible d'attaques armées en 2008, soit trois fois plus que l'année précédente. Au Pakistan, dans le district de Swat au nord-ouest du pays, 356 écoles ont été partiellement ou totalement détruites lors d'affrontements entre l'armée et les talibans entre 2007 et mars 2009. En Inde, 300 établissements scolaires ont subi l'assaut des rebelles maoïstes au cours des trois dernières années...

Dans le monde entier, « le nombre des attaques a dramatiquement augmenté au cours des trois dernières années », explique l'Unesco dans son rapport L'Education prise pour cible publié récemment.

Ces attaques, assassinats, enlèvements, abus sexuels et autres violences étaient déjà suffisamment nombreuses et inquiétantes pour faire l'objet d'un premier rapport en 2007. Elles concernent désormais 32 pays.

En tête de ce palmarès figurent l'Afghanistan, la Colombie où 90 enseignants ont été tués entre 2006 et 2008, l'Irak où 71 universitaires et 37 étudiants ont été assassinés mais aussi le Népal, les territoires palestiniens, la Thaïlande et le Zimbabwe. Elles peuvent être le fait de rebelles comme des armées régulières.

Dans des pays où les systèmes éducatifs sont déjà largement en difficulté, ces violences répétées contribuent à fragiliser un peu plus le droit à l'éducation. Enseigner, dans de telles conditions, devient un métier dangereux que de nombreux jeunes refusent d'exercer. Pour les gouvernements, il devient dès lors difficile de recruter.

Enfants-soldats

Nombre de ces attaques ciblent les enfants sur le chemin de l'école, une technique courante pour recruter des enfants-soldats, note l'auteur du rapport, Brendan O'Malley, qui a relevé des pratiques comparables au Burundi, au Tchad mais aussi aux Philippines et en Somalie.

Tarrem Kosa, qui vit dans le Chhattisgarh à l'est de l'Inde, avait 13 ans quand les rebelles maoïstes ont débarqué dans son école. « Ils ont pris quatre élèves », a raconté le garçon qui s'est rendu à la police. Effet collatéral : « La peur de tels recrutements a privé nombre d'enfants de l'école au Sri Lanka et au Venezuela », indique M. O'Malley.

Comment expliquer une telle envolée macabre ? Contrairement à une idée couramment admise, l'éducation n'apparaît pas toujours comme un lieu « neutre ». Elle peut symboliser une culture rejetée ou inféodée à un gouvernement combattu, viser, comme au Zimbabwe, des professeurs d'université.

A la source de ces attaques, on trouve aussi la volonté de priver les filles d'éducation. Le Pakistan et l'Afghanistan où « 40 % des écoles attaquées sont des écoles réservées aux filles » constituent des cas extrêmes.

Ces violences laissent les communautés, tant locales qu'internationale, démunies. Ici et là, des habitants ont commencé à organiser la protection des enfants et des écoles. Au Népal, un accord entre les représentants gouvernementaux, la société civile et les rebelles maoïstes a permis la création d'« écoles-zones de paix » dans deux districts du pays. En Afghanistan, la création de groupes de défense et de protection, dans deux provinces du pays, a évité des attaques.

Mais ces initiatives, isolées, ne doivent pas masquer le fait que les attaquants agissent le plus souvent dans l'impunité

Brigitte Perucca

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