jeudi 8 juillet 2010

Que vont devenir les mineurs étrangers arrêtés à Calais ?

Que vont devenir les mineurs étrangers arrêtés à Calais ?
LEMONDE.FR : Article publié le 23.09.09
armi les 276 migrants interpellés mardi 22 septembre pendant le démantèlement de la "jungle" de Calais, 135 se sont déclarés "mineurs isolés". Agés de 14 à 18 ans, Afghans pour l'immense majorité d'entre eux, ils ont été placés, selon Eric Besson, "dans cinq centres d'hébergement spécialisés", notamment dans le Pas-de-Calais, en Moselle, dans la Loire et dans le Val-de-Marne.

Contrairement à leurs aînés, ils sont inexpulsables. Conformément à la loi du 5 mars 2007, ils relèvent théoriquement de l’obligation de protection de l’enfance. Mais,"en vérité, dans le cas des migrants de Calais, explique Dominique Versini, défenseure des enfants, la situation est très compliquée. On est dans un no man's land".

D'après le rapport de la coordination française pour le droit d'asile (CFDA) publié en septembre 2008 et intitulé "La loi des jungles", "2 293 mineurs ont été interpellés entre janvier et septembre 2007 par les services de police" et "36,2 % d'entre eux avaient moins de 16 ans". Dans le Pas-de-Calais, leur prise en charge passe systématiquement par la police aux frontières (PAF), qui saisit ensuite le parquet des mineurs et/ou le juge des enfants. Ce sont ceux-ci qui feront en sorte que le mineur intègre une structure adaptée.

Une fois les jeunes interpellés, les autorités doivent d'abord s'assurer qu'elles ont affaire à des mineurs. "La question ne se pose pas quand ils ont visiblement moins de 16 ans. C'est nettement plus problématique pour les plus vieux, entre 16 et 18 ans", note Dominique Versini. D'après la défenseure des enfants, "les 'taskera', qui sont l'équivalent afghan de nos cartes d'identité, ne précisent pas systématiquement l'âge du détenteur. Elles comportent rarement des photos et des dates de naissance précises. Cerise sur le gâteau : l'authenticité des documents est souvent mise en doute."

"UNE SITUATION FOLLE"

Dans ces conditions, les autorités peuvent réclamer un examen médical qui attestera la minorité de la personne concernée. "Le problème, c'est que cette radiographie osseuse donne des résultats extrêmement imprécis, avec une fourchette de plus ou moins 18 mois", explique Dominique Versini. Plus grave, la multiplication de ces tests sur une même personne peut s'avérer dangereuse pour la santé, du fait des radiations.

Si la minorité est finalement établie, la PAF doit confier les jeunes au conseil général du Pas-de-Calais, à la cellule des mineurs étrangers isolés, chargée de l'orientation vers des foyers ou des structures d'accueil. "Ceux du Calaisis sont généralement placés dans le foyer Yvonne-de-Gaulle, géré par l'association La Vie active, située à Blériot-Plage", où "le nombre de mineurs accueillis n'a cessé d'augmenter : 525 en 2002, 2 600 en 2007", précise le rapport de la CFDA. Cependant, un grand nombre de ces jeunes quittent rapidement les foyers et retournent dans les "jungles". Plus généralement, "bon nombre d'entre eux fuguent le soir même", confirme Jean-Pierre Rosenzweig, le président du tribunal pour enfants de Bobigny.

Et pour cause : les structures existantes ne sont pas adaptées. Selon une infirmière bénévole de La Belle Etoile (une association d'aide aux migrants de Calais) citée par la CFDA, "aujourd'hui, ce qui est fait, c'est de l'hébergement d'urgence. Rien de plus". Les mineurs sont d'autant plus tentés de partir qu'ils souhaitent poursuivre leur voyage jusqu'en Angleterre et se méfient des dispositifs institutionnels.

De nouveau dehors, ils reprennent leur vie d'errance, de campement informel en campement informel, dans l'attente du départ outre-Manche. "Ils n'ont droit à rien, ne sont pas scolarisés, ne reçoivent aucune formation professionnelle. C'est une situation folle", conclut Dominique Versini.

Elise Barthet

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire